Epreuve optionnelle commune aux ENS de Paris et Lyon
PHYSIQUE PC 2
Durée : 5 heures
L'usage de calculatrices électroniques de poche à alimentation autonome, non imprimantes et sans document d'accompagnement, est autorisé. Cependant, une seule calculatrice à la fois est admise sur la table ou le poste de travail, et aucun échange n'est autorisé entre les candidats.
Présentation
Nous allons nous intéresser aux suspensions de particules dans un fluide comme, par exemple, des émulsions d'un fluide dans un autre, des solutions colloïdales telles que la peinture ou certains gels, ou encore des poussières dans l'atmosphère. Ces suspensions ont un certain nombre de propriétés physiques communes dont nous allons étudier quelques aspects. Dans tout le problème, on considère que le champ de pesanteur est uniforme.
Remarques préliminaires
Les quatre parties sont largement indépendantes. Une bonification sera systématiquement accordée aux candidats ayant répondu de manière correcte à toutes les questions d'une sous-partie.
Dans la correction, une grande attention sera portée aux remarques de caractère physique, à la clarté de la rédaction ainsi qu'à la présentation.
Il est demandé aux candidats de rappeler les numéros identifiant une question avant d'en proposer la solution.
La circulaire n du 1er février 1999 autorise l'usage des calculatrices de poche, y compris les calculatrices programmables et alphanumériques ou à écran graphique, à condition que leur fonctionnement soit autonome et qu'il ne soit pas fait usage d'imprimante. Formulaire
Nombre d'Avogadro :
Constante de Boltzmann :
Constante des gaz parfaits :
Viscosité dynamique de l'eau à la température de .s
On rappelle que pour :
I Equilibre d'une particule solide dans un fluide
On considère un liquide au repos dans le champ de pesanteur . Ce liquide est supposé incompressible de masse volumique . On note la profondeur mesurée à partir de la surface libre du liquide correspondant à . La pression à la surface du liquide est .
a) Etablir l'équation différentielle vérifiée par la pression qui décrit l'équilibre du liquide dans le champ de pesanteur.
b) En déduire le champ de pression dans le liquide.
c) On considère une particule solide immobile complètement immergée dans le liquide. Cette particule sphérique est supposée homogène, de masse volumique et de rayon . Le barycentre de la particule est à l'altitude . Calculer la résultante des forces de pression agissant sur la particule.
d) En ne considérant que les forces de pesanteur et de pression qui agissent sur la particule, préciser à quelle condition celle-ci reste au repos.
e) Discuter brièvement le mouvement de la particule lorsque cette condition d'équilibre n'est pas satisfaite.
On suppose maintenant que le fluide est l'atmosphère, assimilée à un gaz parfait de masse molaire , de masse volumique , et de température uniforme . On note la pression, représentant maintenant l'altitude mesurée depuis le sol. La pression au sol est .
a) Déterminer, dans le champ de pesanteur , la pression de l'air. On note la longueur caractéristique qui apparaît dans l'expression de .
b) Réécrire et en faisant apparaître la constante de Boltzmann ainsi que la masse effective d'une "molécule d'air" définie comme le rapport . En déduire le nombre de "molécules" par unité de volume et interpréter ce résultat.
c) Estimer la longueur pour l'air.
d) On recherche maintenant les conditions d'équilibre d'une particule solide dans l'atmosphère en ne considérant toujours que les forces de pesanteur et de pression. Le barycentre de la particule est à l'altitude . Cette particule sphérique est supposée homogène, de masse volumique et de rayon inférieur au millimètre. Etablir une expression approchée de . En déduire la résultante des forces de pression sur la particule.
e) Quelle devrait être alors la masse volumique de la particule pour que puisse compenser le poids de la particule? Comment expliquez-vous que des poussières puissent rester en suspension dans l'air?
Dans cette question, on suppose que la masse volumique du fluide considéré est uniforme. La position de la particule solide est repérée par son altitude . On admet que la probabilité de trouver une particule solide de masse volumique et de volume , entre les altitudes et , s'écrit :
où est une constante.
a) Quelle est la valeur de ? En déduire la valeur de la constante .
b) L'altitude moyenne de la particule est donnée par l'intégrale:
Calculer . Analyser le rôle joué par la température.
c) On s'intéresse à une particule sphérique de rayon dans un fluide qui occupe l'espace . La surface définie par correspond à une interface solide. On considère que la particule est en suspension si son altitude moyenne est supérieure à son rayon. En déduire la valeur limite du rayon d'une particule en suspension. On exprimera en fonction de et .
d) On se place à une température de . Calculer ce rayon limite pour une particule d'oxyde de silice de masse volumique en suspension dans l'eau, puis dans l'air. Quelle devrait être la masse volumique d'une particule de de rayon pour qu'elle soit en suspension dans l'eau?
II Ecoulement d'un fluide autour d'une particule solide
Nous considérons une particule solide sphérique de rayon qui est maintenue immobile dans le référentiel du laboratoire. Un fluide incompressible de masse volumique s'écoule en régime stationnaire autour de la particule. Loin de la particule, le mouvement du fluide est rectiligne uniforme de vitesse et sa pression vaut . On néglige dans cette partie l'effet de la gravité, sauf dans les questions II.1.e et II.2.g.
On suppose tout d'abord que le fluide est parfait.
a) Rappeler ce qu'est un fluide parfait incompressible et donner les équations différentielles vérifiées par le champ de vitesse.
Fig. 1 - Notations utilisées.
b) On considère un référentiel galiléen ( ) dont l'origine est attachée au centre de la sphère. On s'intéresse au champ de vitesse en coordonnées sphériques (voir Fig.1) :
On admet que la solution pour le champ de vitesse considéré s'écrit, au point , sous la forme :
où est la distance du point au centre de la sphère. et sont des constantes. Préciser les conditions aux limites que doit satisfaire ce champ de vitesse. En déduire la valeur des constantes et , ainsi que le champ de vitesse correspondant.
c) Déterminer le champ de pression . Quelles sont les propriétés de symétrie de ce champ? Quelle est la force exercée par le fluide sur la particule sphérique?
d) On considère maintenant que, loin de la particule, le fluide est au repos par rapport à un référentiel galiléen ( ) et que la particule est en mouvement avec une vitesse . Dans le référentiel ( ), exprimer le champ de vitesse du fluide autour de la particule et déterminer l'énergie cinétique totale du fluide. Discuter ce résultat. Par la suite, on admet que la relation obtenue entre l'énergie cinétique totale du fluide et la vitesse de la particule reste valable en régime non stationnaire.
e) On se place maintenant dans le champ de pesanteur . Le fluide est initialement au repos dans le référentiel galiléen ( ). On lâche avec une vitesse initiale nulle une particule sphérique immergée dans le fluide et de masse volumique . Effectuer un bilan énergétique pour le système "particule + fluide" entre les instants et . En déduire l'équation différentielle vérifiée par la vitesse dans laquelle on fera explicitement apparaître et . Commenter ce résultat.
2. On considère maintenant que le fluide possède une viscosité dynamique constante.
a) Rappeler l'expression de la force surfacique visqueuse (ou force de cisaillement) dans un fluide dont le champ de vitesse est de la forme .
b) Dans un fluide visqueux en écoulement stationnaire autour d'une sphère immobile et pour de faibles nombres de Reynolds ( ), on admet que les champs de vitesse et de pression s'écrivent au point :
Préciser les conditions aux limites vérifiées par les champs de vitesse et de pression. Discuter les différences notables avec le cas du fluide parfait.
c) Déterminer la force exercée par le fluide sur la particule, due aux forces de pression uniquement.
d) L'expression générale de la force de cisaillement exercée par le fluide sur la particule n'est pas simple. Pour comprendre ce qu'il se passe dans un proche voisinage de l'interface entre la particule et le fluide, on introduit une nouvelle variable telle que , avec . Donner l'expression du champ de vitesse à l'ordre le plus bas en . Quel type d'écoulement existe-t-il au voisinage de la sphère au premier ordre en ?
e) En déduire l'expression de la force de cisaillement exercée par le fluide sur la particule.
f) Exprimer finalement la force totale exercée par le fluide visqueux sur la sphère.
g) On suppose maintenant que le fluide est au repos et d'extension infinie. Décrire, sous l'effet du champ de pesanteur, le mouvement d'une particule sphérique immergée dans le fluide, de vitesse initiale nulle et de masse volumique . Pour cela, on négligera l'énergie cinétique du fluide et on admettra que la force de frottement atteint instantanément la valeur obtenue à la question II.2.f. Définir un temps caractéristique et une vitesse caractéristique associés à ce mouvement. Donner l'expression de et en faisant apparaître explicitement et . Estimer les valeurs de et dans l'eau pour des particules d'oxyde de silice de masse volumique et de rayons et 1 mm . Discuter la validité des estimations obtenues.
III Agitation thermique et frottement visqueux
Sous certaines conditions, l'agitation thermique permet à des particules solides de rester en suspension dans l'air ou dans l'eau. Nous avons par ailleurs établi que ces particules sont soumises à une force de frottement d'origine visqueuse qui s'oppose à leur mouvement. Pour comprendre quelle est l'influence de la viscosité sur le mouvement d'une particule sensible à l'agitation thermique, nous allons étudier un modèle simple introduit par Paul Langevin (1908). On considère le mouvement à une dimension d'une particule de masse le long d'un axe (on note et les valeurs algébriques de la position et de la vitesse de la particule) soumise à une force "aléatoire" et à une force de frottement , où est une constante positive. Il n'y a pas de pesanteur dans ce modèle simple.
Montrer que l'équation du mouvement de la particule peut se mettre sous la forme :
Compte tenu du caractère complexe de la force aléatoire , nous ne cherchons pas à résoudre directement l'équation du mouvement. En fait, sous certaines hypothèses, le mouvement "moyen" de la particule dépend peu de la forme exacte de la force aléatoire. Pour accéder à ce mouvement "moyen", on imagine qu'un grand nombre de particules se trouve initialement à la position à l'instant . Chaque particule vérifie, indépendamment des autres, l'équation du mouvement de la question précédente. En revanche, à chaque instant, la valeur de la force aléatoire diffère a priori d'une particule à l'autre.
L'opérateur mathématique noté permet de représenter symboliquement, à un instant donné, la valeur moyenne sur toutes les particules des grandeurs , etc. Le caractère aléatoire de la force se traduit alors par . De plus, la position de la particule n'étant pas corrélée à la force, on a . Enfin, comme cet opérateur agit à un instant donné, on suppose qu'il commute avec l'opérateur de dérivée temporelle, soit : .
a) Déterminer l'équation différentielle vérifiée par .
b) Pour un gaz de particules de masse à la température , donner la moyenne temporelle du carré d'une composante cartésienne de la vitesse, notée . Dans le reste de question III.2, on admettra que .
c) Compte tenu des conditions initiales, résoudre l'équation vérifiée par .
d) En déduire .
e) Définir un temps caractéristique séparant deux régimes dans l'évolution temporelle de . Préciser l'évolution temporelle aux temps courts et aux temps longs. Commenter le mouvement "moyen" obtenu dans chaque régime. Que peut-on dire de l'effet combiné du frottement et de l'agitation thermique? On posera dans la suite .
On s'intéresse dans cette question uniquement au comportement aux temps longs. On généralise, pour un mouvement à trois dimensions relativement à un repère cartésien (Oxyz), le résultat obtenu pour le modèle à une dimension en supposant que :
a) Quelle propriété du système peut-on invoquer pour justifier cette hypothèse?
b) Déterminer , où représente la distance de chaque particule au point , en faisant apparaître le coefficient .
c) Déterminer le temps mis par une particule pour se déplacer en moyenne d'une distance égale à son diamètre .
d) On considère une particule sphérique de rayon dans un liquide de viscosité . Donner l'expression de en fonction de et .
e) Calculer la valeur de dans l'eau pour des particules sphériques de rayons et 1 mm à la température de . Que peut-on en conclure sur la dynamique de telles particules en suspension?
IV Equilibre d'une goutte de liquide avec sa vapeur
Dans certains cas, les particules en suspension ne sont pas solides, mais liquides. Un équilibre thermodynamique s'établit alors entre la goutte de liquide et la phase fluide environnante. Nous allons aborder les principes physiques qui gouvernent ce type d'équilibre en traitant le cas particulier d'un corps pur. L'objectif de cette partie est donc de décrire l'équilibre d'une goutte liquide d'un corps pur avec sa phase vapeur.
Considérons une enceinte, de volume , fermée par un piston pouvant coulisser librement. Cette enceinte, en contact avec l'atmosphère où règne une pression et une température , renferme un système thermodynamique considéré comme fermé.
On s'intéresse tout d'abord aux propriétés générales d'un corps pur sous une seule phase (gazeuse ou liquide). On note l'énergie interne et l'enthalpie libre de ce corps, où est l'entropie et le nombre de moles de cette phase.
a) Rappeler la relation existant entre l'enthalpie libre , l'énergie interne , la pression , la température , le volume et l'entropie . Exprimer, pour un système fermé, les différentielles et .
b) En utilisant la propriété d'extensivité de , montrer que l'on peut écrire :
est l'enthalpie libre molaire, aussi appelée potentiel chimique.
c) Exprimer, pour un système ouvert, la différentielle en fonction de , et . En déduire la différentielle pour un système ouvert.
d) Montrer que :
e) On note l'enthalpie libre molaire de la phase gazeuse à la pression et à la température . Déterminer, pour cette phase assimilée à un gaz parfait, l'expression de la différence :
où est la pression de vapeur saturante à la température .
f) On note l'enthalpie libre molaire de la phase liquide à la pression et la température . Déterminer, pour un liquide incompressible dont le volume molaire est noté , l'expression de la différence :
On suppose qu'une goutte de liquide sphérique de rayon s'est formée dans l'enceinte et se trouve à l'équilibre thermodynamique avec le reste du corps pur sous phase gazeuse. La pression de la phase gazeuse est notée et sa température . Pour des raisons qui apparaîtront plus claires dans la suite, n'est pas forcément égale à la pression de vapeur saturante . La pression de la phase liquide est notée et sa température . On note et l'énergie interne, l'entropie et le volume de la phase gazeuse. On note les mêmes grandeurs et pour le liquide. On admet que l'énergie interne totale du système comprend une contribution supplémentaire , où est une grandeur positive et l'aire de la goutte.
a) Préciser la dimension de . Indiquer des grandeurs physiques qui ont la même dimension.
b) Pour un système fermé en contact avec un milieu extérieur de température et de pression fixées, on définit la fonction , où et sont l'énergie interne et l'entropie du système. Montrer que est minimum à l'équilibre.
c) Donner l'expression de en fonction de et .
d) En déduire la différentielle en fonction des différentielles , et . On remarque que les grandeurs et peuvent varier indépendamment les unes des autres. Trouver les conditions d'équilibre mécanique et thermique du système. Discuter notamment la relation obtenue entre la pression de la phase vapeur et celle de la phase liquide.
e) Dans toute la suite du problème, on suppose que l'équilibre mécanique et thermique est réalisé. Donner alors l'expression correspondante de d , que l'on notera . Donner la condition d'équilibre des quantités de matière des phases liquide et gazeuse. Déterminer le sens d'évolution du système lorsque cette condition d'équilibre n'est pas satisfaite.
f) La phase liquide est supposée incompressible. La pression de vapeur saturante, , représente la pression d'équilibre entre la phase liquide et la phase vapeur lorsque leur interface est plane ( ). Montrer que l'équilibre des quantités de matière entre la phase gazeuse et la phase liquide sous une pression détermine un rayon d'équilibre de la goutte liquide qui vérifie la relation de Kelvin :
où . On exprimera et en fonction des paramètres du problème et .
g) Pour l'eau, à la température de . Montrer qu'à cette température et préciser à quelle condition il existe une goutte d'eau. Pour cela, on aura avantage à s'appuyer sur une représentation graphique. Ces résultats restent-ils valables pour de hautes températures?
3. Pour mieux comprendre ce que représente le rayon d'équilibre obtenu précédemment, on s'intéresse au potentiel thermodynamique , fonction du rayon de la goutte de liquide.
a) Montrer que ce potentiel peut s'écrire :
où on a posé .
b) Déterminer la dépendance en de .
c) Représenter graphiquement dans les deux cas : et . Dans chaque cas, et en fonction des valeurs de , déterminer le sens d'évolution spontanée de . Dans le cas où passe par un maximum, déterminer le rayon pour lequel la valeur maximale est atteinte et déterminer . A quoi peut-on comparer ?
d) Calculer numériquement et à pour ; . Pour l'eau, on donne et pour une température de . Commenter ces résultats.
e) Expliquer pourquoi il est possible de trouver de la vapeur d'eau sans phase liquide à la température pour des pressions . Proposer au moins un mécanisme physique susceptible de faire apparaître la phase liquide.
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