Quelques phénomènes associés à l'absorption de la lumière
Ce problème s'intéresse à divers aspects de la spectroscopie d'absorption et à ses applications. Dans la première partie, on étudie un modèle de l'absorption résonante d'une onde électromagnétique dans un milieu. Dans la deuxième partie, on s'intéresse à la méthode de mesure photoacoustique, qui permet d'étudier l'absorption de la lumière par les effets thermiques qu'elle induit. La troisième partie propose une application de la spectroscopie d'absorption à l'étude de la cinétique d'une réaction d'isomérisation.
Les trois parties sont indépendantes entre elles.
Dans tout le problème, on se place dans un référentiel galiléen ( ), rapporté au trièdre cartésien , associé à la base orthonormée directe ( ).
Les fonctions harmoniques du temps, du type , sont représentées en notation complexe par une grandeur soulignée ) (où est le nombre complexe de module 1 et d'argument ).
On donne :
permittivité du vide ;
célérité de la lumière dans le vide : ;
constante des gaz parfaits ;
charge élémentaire ;
constante d'Avogadro ;
masse de l'électron .
A. Un modèle de l'absorption résonante d'une onde électromagnétique par un atome
Onde électromagnétique dans le vide
On considère une onde électromagnétique plane polarisée rectilignement selon , se propageant dans la direction , dans le vide. Le champ électrique associé est alors, en notation complexe: .
1.a. Rappeler la relation entre et .
1.b. Déterminer le champ magnétique complexe associé à cette onde.
1.c. Déterminer le vecteur de PoYNTING (valeur réelle).
1.d. On appelle intensité de l'onde électromagnétique la puissance électromagnétique moyenne traversant une surface unité perpendiculaire à , située à la cote . Vérifier que est indépendant de , et l'exprimer en fonction de et .
2. Interaction avec un atome - Coefficient d'absorption
On considère un atome centré en , représenté par le modèle de la charge élastiquement liée.
Les interactions subies par un électron de l'atome (masse , charge -e), situé au point et de vitesse , sont modélisées par les forces suivantes:
force de rappel élastique ;
, force dissipative ;
la force de LORENTZ associée au champ électromagnétique de l'onde électromagnétique considérée au 1.
Les dimensions de l'atome sont très faibles devant la longueur d'onde de l'onde électromagnétique incidente.
2.a. Par un raisonnement en ordre de grandeur, justifier que, dans l'approximation non relativiste, on peut négliger la force magnétique s'exerçant sur l'électron. Justifier également qu'on peut remplacer le champ par le champ .
2.b. En régime établi, l'électron acquiert un mouvement harmonique selon , à la pulsation de l'onde électromagnétique. Son mouvement: est caractérisé en notation complexe par la grandeur .
Déterminer en fonction de et
2.c. Déterminer la vitesse complexe puis la vitesse réelle , sous la forme , où et seront exprimées en fonction de .
2.d. Montrer que la puissance moyenne de la force de Lorentz agissant sur l'électron peut s'écrire ,
où est l'intensité de l'onde électromagnétique incidente et où est de la forme étant un coefficient que l'on exprimera en fonction de et .
3. Coefficient d'absorption
La puissance moyenne fournie à l'atome s'accompagne d'une diminution équivalente de la puissance transportée par l'onde électromagnétique, de telle sorte que l'intensité de l'onde électromagnétique dépend désormais de . On suppose que, par unité de volume, le milieu contient atomes identiques au précédent.
3.a. En effectuant un bilan d'énergie sur un volume cylindrique de section compris entre les cotes et , montrer que vérifie l'équation différentielle :
où est un paramètre que l'on exprimera en fonction de et .
3.b. Déterminer en fonction de . Quelle signification physique peuton donner au paramètre ?
3.c. Pour quelle pulsation est elle maximale ? Exprimer sa valeur maximale notée en fonction de et .
Application numérique : Pour l'atome de Césium, on a une absorption maximale pour une longueur d'onde .
Déterminer dans une vapeur de césium sous une pression de barà la température de 298 K .
Sachant que , déterminer le coefficient d'absorption de la vapeur de Césium atomique dans ces conditions. Commenter.
3.d. Représenter graphiquement l'allure de la fonction . Pourquoi appelle-t-on ce type d'absorption «absorption résonante»?
On suppose . Déterminer en fonction de la largeur à mi-hauteur, notée , de la courbe (c'est à dire la largeur de l'intervalle des valeurs de dans lequel ).
3.e. Par analogie avec les résultats du cours de mécanique ou d'électrocinétique, définir le facteur de qualité associé à l'absorption résonante. Calculer numériquement pour l'atome de Césium. Commenter, en comparant cette valeur à celles couramment observées, par exemple en travaux pratiques, pour les phénomènes de résonance en mécanique ou électrocinétique.
B. Détermination du spectre d'absorption par effet photoacoustique.
On propose dans cette partie une méthode de mesure indirecte du coefficient d'absorption d'une onde lumineuse par un solide .
Le principe de la méthode est schématisé en figure 1 : l'échantillon à étudier est placé dans une enceinte fermée de section ; Il occupe la région et est surmonté par de l'air, gaz supposé parfait, occupant l'intervalle .
Par une fenêtre transparente ménagée dans la paroi , on envoie, en incidence normale, un faisceau laser monochromatique de pulsation .
L'onde lumineuse est partiellement transmise dans l'échantillon, où elle est absorbée. Le transfert thermique associé induit un gradient de température, dans l'échantillon et dans l'air, qui s'accompagne d'une variation de la
pression dans l'enceinte.
Cette variation de pression, mesurée à l'aide de microphones très sensibles peut ainsi donner accès au coefficient d'absorption de l'échantillon. Ce type de mesure est nommé «mesure photoacoustique d'absorption».
Nous étudions un modèle de cette expérience basé sur les hypothèses suivantes:
L'échantillon (resp. l'air) a une conductivité thermique (resp. ), une masse volumique (resp. ) et une capacité thermique massique à pression constante (resp. ). Dans un premier temps, , et sont supposés constants pour l'air et pour l'échantillon.
On ne tient compte que des phénomènes de transferts thermiques par conduction.
On néglige les effets de bords et on suppose donc que la température ne dépend que de la cote et, éventuellement, du temps. On note la température dans l'échantillon (pour ) et la température dans l'air (pour ).
Le contact thermique air-échantillon est parfait : la température est continue à l'interface .
Les variations de pression dans l'enceinte sont très faibles : on pourra donc considérer que les transferts thermiques s'effectuent à pression constante.
L'onde incidente n'est pas absorbée dans l'air.
La paroi est adiabatique, et l'échantillon est maintenu à une température en .
1. Transferts thermiques dans l'air
1.a. Rappeler la loi de FOURIER de la conduction thermique reliant le vecteur densité de courant thermique et le gradient de la température dans un milieu de conductivité thermique .
On admet qu'en première approximation, le champ vérifie l'équation aux dérivées partielles:
où .
1.b. Déterminer la forme générale des solutions stationnaires de (1) (pour lesquelles ne dépend pas du temps).
1.c. Quelle condition la paroi adiabatique impose-t-elle en ? En déduire que le champ de température dans l'air est uniforme en régime stationnaire.
2. Transferts thermiques dans l'échantillon
Dans l'échantillon (pour ), l'intensité de l'onde lumineuse (puissance moyenne transportée par unité de surface), varie avec selon une loi , étant une constante, et le coefficient d'absorption de l'échantillon. La puissance perdue par l'onde est intégralement fournie à l'échantillon. On admet que l'intensité de l'onde est uniforme sur toute la section de l'échantillon.
2.a. On considère le système ( ) formé par une portion de l'échantillon, de section , comprise entre et .
Exprimer la puissance moyenne fournie par l'onde lumineuse au système ( ) en fonction de et .
Pourquoi peut-on légitimement considérer la puissance moyenne et non la puissance instantanée fournie par l'onde lumineuse?
2.b. En effectuant un bilan énergétique sur ( ), montrer que vérifie l'équation aux dérivées partielles:
où est un coefficient constant que l'on exprimera à l'aide des paramètres , et .
2.c. En régime stationnaire, déterminer la forme générale de la température dans l'échantillon en fonction de et de deux constantes d'intégration.
3. Interface air- échantillon et régime stationnaire de l'ensemble
3.a. A partir des relations de continuité de la température et du vecteur densité de courant thermique, écrire les relations existant entre et , d'une part et et d'autre part.
On se place en régime stationnaire, où la température est notée dans l'échantillon et dans l'air.
3.b. Expliciter les conditions aux limites vérifiées par la température en et .
Exprimer en fonction de et .
Dans la pratique, l'onde lumineuse est totalement absorbée dans l'échantillon, ce qui se traduit mathématiquement par la condition . On adopte alors pour l'expression simplifiée:
3.c. Calculer la puissance thermique évacuée par conduction à la frontière , en fonction de et .
Retrouver très simplement ce résultat en effectuant un bilan énergétique sur un système bien choisi.
3.d. Exprimer la température dans l'air , en fonction de et . Est-il possible de réaliser une mesure photoacoustique d'absorption en régime stationnaire?
4. Excitation dépendant du temps et régime sinusoïdal
On suppose désormais que l'onde excitatrice a une intensité modulée sinusoïdalement à la pulsation selon une loi où est une constante. L'équation aux dérivées partielles vérifiée par devient donc, en conservant les mêmes notations:
L'équation vérifiée par dans l'air est inchangée par rapport à la question B. 1.
On étudie une situation de régime sinusoïdal établi dans laquelle les températures dans l'échantillon et dans l'air s'écrivent respectivement et , où et sont des fonctions sinusoïdales de pulsation . Les fonctions et sont les températures de régime stationnaire précédemment étudiées.
En représentation complexe, on note: , et et étant des fonctions à valeurs complexes.
4.I. Température dans l'air
4.I.a. Déterminer l'équation aux dérivées partielles vérifiée par . Montrer que vérifie une équation de la forme , où est un paramètre, homogène à une longueur, que l'on exprimera en fonction de et .
4.I.b. Quelle est la condition aux limites vérifiée par en ? Du fait que , on admet qu'on peut remplacer par pour exprimer cette condition aux limites sur . On pose
En déduire que . Quel sens concret peut-on donner à ?
Application numérique. Pour l'air, on a . Déterminer numériquement pour une modulation du faisceau excitateur à une fréquence de 100 Hz . Commenter.
4.II. Température dans l'échantillon
4.II.a. En soustrayant l'équation vérifiée en régime stationnaire, on montre que est solution de l'équation suivante (calculs non demandés) :
En déduire l'équation différentielle vérifiée par . On exprimera cette équation en fonction de et de la distance .
4.II.b. Quelle sont les conditions aux limites vérifiées par en et ?
Dans toute la suite, on suppose que l'échantillon est optiquement et thermiquement épais, ce qui signifie et .
On montre alors (calcul non demandé) que s'écrit :
4.III. Température de surface
On cherche maintenant à déterminer , à partir de l'expression de , et en utilisant la relation de continuité du vecteur densité de courant thermique en .
4.III.a. On suppose que l'on a . Déterminer en fonction de et .
Dans cette situation, la méthode photoacoustique est-elle bien adaptée à la mesure de ?
4.III.b. On se place maintenant dans le cas où . Montrer qu'alors on peut écrire , où est une constante complexe, que l'on exprimera en fonction de et .
Ce cas est-il favorable à la méthode photoacoustique de détermination de ? Pour un échantillon et un laser de longueur d'onde donnés, sur quel paramètre expérimental peut on agir facilement pour ce placer dans la limite ?
4.III.c Application numérique : On étudie un échantillon de Silicium pour lequel , avec un laser délivrant une intensité , modulée à une fréquence de 100 Hz . On se place à une longueur d'onde où . On négligera devant .
Déterminer numériquement et l'amplitude des fluctuations de température à la surface de l'échantillon, notée .
5. Variations de pression induite
On s'intéresse maintenant aux conséquences de la variation de température dans l'air sur la pression qui règne dans l'enceinte. Les conditions expérimentales sont inchangées (modulation sinusoïdale d'intensité).
Afin d'obtenir un ordre de grandeur des fluctuations de pression, induites par la dilatation thermique de l'air, nous envisageons un modèle simplifié (figure 2) dans lequel on imagine que l'enceinte comprend deux compartiments séparés par une paroi fictive (sans masse), mobile sans frottements, située à l'instant en où est la longueur définie en B.4.l.a.
On fait également les suppositions suivantes:
La pression dans le système est uniforme et s'écrit , où est la pression moyenne dans l'enceinte.
L'air compris dans l'intervalle a une température uniforme ,
où est la température moyenne dans
l'enceinte et étant la température de surface évaluée en B.4.III.
Le reste de l'air, vérifiant , est soumis à une évolution adiabatique réversible.
L'air est considéré comme un gaz parfait dont le rapport des capacités thermiques a pression et volume constant est .
Figure 2
Toutes les fluctuations, de température, de pression et de sont très faibles devant les valeurs moyennes de ces grandeurs.
On rappelle que de plus, . On suppose enfin que la surface de l'échantillon reste fixe.
5.a. En considérant l'air dans la région , exprimer la variation de pression en fonction de et .
5.b. En considérant l'air dans la région , exprimer de même en fonction de et .
5.c. En déduire enfin en fonction de .
Application numérique: En utilisant les valeurs numériques données aux questions B.4.1.b. et B.4.III.c, déterminer l'amplitude des fluctuations de pression sachant que et .
C. Etude d'une cinétique réactionnelle par spectroscopie d'absorption.
Le dithizonate de mercure est un complexe du mercure présentant deux isomères, notés et . Les solutions organiques (solvant xylène ou
toluène) de ont une couleur orange, alors que celles du sont bleues.
Dans l'obscurité, la forme est beaucoup plus stable et la forme est très largement minoritaire.
Si l'on expose la solution à une forte irradiation lumineuse, on observe un équilibre entre les deux isomères:
On se propose d'étudier certains aspects thermodynamiques et cinétiques de cet équilibre par spectrométrie d'absorption.
Le principe de la méthode de spectroscopie d'absorption est schématisée en figure 3.
La solution est placée dans une cuve de longueur , sur laquelle on envoie un faisceau lumineux (très peu intense, donc sans influence sur la réaction), d'intensité et de longueur d'onde .
On mesure alors une intensité transmise , où est le coefficient d'absorption de la solution et a une constante dépendant seulement de la cuve.
On admet que, lorsque la solution contient une concentration de forme et de forme , le coefficient d'absorption de la solution à la longueur d'onde est de la forme (loi de LAMBERT - BEER) : , où et sont respectivement les coefficients d'extinction molaire des espèces et et est le coefficient d'absorption du solvant pur.
1. Mesures
1.a. Proposer un protocole expérimental permettant de mesurer l'absorbance liée aux seuls solutés, définie par .
L'expérience est menée comme suit :
On commence par éclairer vivement et longuement une solution de concentration totale en dithyzonate de mercure. On obtient ainsi une solution d'apparence bleutée, contenant un mélange des deux formes, dont les concentrations sont alors (pour ) et (pour ).
On cesse d'éclairer la solution à l'instant , et on la place très rapidement dans le spectroscope, avec lequel on détermine . La solution redevient progressivement orange.
La figure 4 ci-après représente les spectres obtenus à (spectre ) et à la fin de l'expérience ( , spectre ).
A l'instant , les concentrations en et sont respectivement notées et .
1.b. Montrer que la quantité est proportionnelle à , et expliciter le facteur de proportionnalité en fonction de et .
1.c. Pour des raisons de rapidité, on effectue les mesures d'absorbance à une longueur d'onde fixée. On obtient ainsi un ensemble de valeurs . Parmi les valeurs particulières de indiquées sur la figure 4 , déterminer, en justifiant avec soin votre réponse, la (ou les) longueur(s) d'onde judicieuse(s) pour effectuer les mesures?
1.d. On mesure et . De plus, on admet qu'à cette longueur d'onde ( 484 nm ), la forme bleue n'absorbe pratiquement pas la lumière. Déduire de ces mesures la valeur numérique de la constante d'équilibre de la réaction ( ), en présence d'irradiation lumineuse.
2. Etude expérimentale de la disparition de
On admet qu'au cours des mesures, on peut négliger l'influence cinétique de la réaction 1: .
On obtient les mesures suivantes:
0
20
40
60
80
100
0,25
0,47
0,62
0,72
0,79
0,83
0,92
2.a. Dans l'hypothèse où la réaction (-1): est d'ordre 1 de constante de vitesse , déterminer en fonction de et .
2.b. A l'aide d'un graphique tracé directement sur la copie, montrer que les valeurs expérimentales sont compatibles avec l'hypothèse d'une cinétique d'ordre 1 , et déterminer la valeur expérimentale de .
Estimer l'incertitude sur , sachant que le temps est déterminé très précisément et que l'absorbance est déterminée avec une précision relative de .
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