Si , si désignent des ensembles finis, et si est une fonction définie sur et à valeurs réelles, alors on note
Soit . On rappelle que, pour un -uplet de variables aléatoires réelles finies sur un univers , la formule de transfert s'écrit : pour toute fonction définie sur et à valeurs réelles,
Pour tout , on note l'ensemble .
Pour désigne l'ensemble des matrices de taille à coefficients réels. Si , on obtient l'ensemble des matrices carrées réelles de taille , et on note la matrice identité de .
Problématique et objectifs
On étudie un modèle de ferromagnétisme : un matériau est constitué de particules qui peuvent, chacune, être orientées dans un sens ou un autre, Nord (+1) ou Sud (-1). Elles sont soumises, d'une part à un champ magnétique extérieur, d'autre part à une température extérieure qui a tendance à les agiter dans tous les sens, et enfin à une interaction locale qui a tendance à les aligner dans le même sens.
Dans tout le sujet, est un entier naturel supérieur ou égal à 2 , et est un réel strictement positif, qui représente l'inverse de la température.
On considère une matrice symétrique de , appelée matrice d'interaction. Pour tout mesure l'interaction entre les particules numérotées et .
On définit une fonction sur par
Pour tous et mesure l'énergie de la configuration couplée avec un champ magnétique extérieur d'intensité . Le premier terme dans son expression est l'interaction locale des particules.
On définit alors, étant fixé, un -uplet de variables aléatoires ( ) tel que, pour tout , la probabilité que ( ) prenne la valeur est proportionnelle à , c'est-à-dire que, pour tout ,
où
On introduit la variable aléatoire , puis les fonctions
On note enfin, sous réserve d'existence, et les limites simples des suites de fonctions et . La fonction est appelée magnétisation et la fonction , pression.
Ce problème est constitué de deux parties indépendantes A et B .
La partie A consiste en l'étude du spectre de la matrice d'interaction dans plusieurs cas particuliers. Elle est elle-même découpée en cinq sous-parties, lesquelles sont indépendantes, à l'exception de la sous-partie V, qui fait appel à des résultats de la sous-partie IV.
La partie B utilise des notations introduites dans la première mais en est totalement indépendante. Elle consiste en l'étude de la convergence de la magnétisation. Elle est elle-même découpée en quatre sous-parties.
La sous-partie I comporte une seule question préliminaire.
La sous-partie II se concentre sur le modèle d'Ising. On y montre que les particules ne conservent pas d'aimantation lorsque l'on retire le champ magnétique extérieur.
Les sous-parties III et IV sont indépendantes de la sous-partie II. Elles explorent le cas particulier du modèle de Curie-Weiss. Dans la sous-partie III, on montre que la conservation de l'aimantation dépend de la valeur de par rapport à 1 . Dans la sous-partie IV, on étudie le comportement asymptotique du champ magnétique moyen au point critique et sans champ magnétique extérieur.
Partie A - Étude du spectre de la matrice d'interaction
On fixe .
I - Quelques inégalités générales
Q1. Expliquer pourquoi la matrice est diagonalisable.
Q2. On note la plus grande des valeurs propres de et la plus petite. Montrer que
Q3. En déduire que
Q4. Donner un encadrement de dans le cas où est de plus une matrice orthogonale distincte de .
Plus généralement, l'étude du spectre complet de présente un intérêt physique pour l'étude du modèle. Dans cette partie, on s'intéresse à quelques cas particuliers.
II - Le modèle de Curie-Weiss
On note la matrice de dont tous les coefficients valent , à l'exception de ses coefficients diagonaux, qui sont nuls. Chaque particule interagit donc de la même façon avec toutes les autres particules.
Q5. Déterminer le spectre de , puis celui de .
III - Le modèle sinus
On note la matrice de définie par
Q6. Montrer que, pour tous et ,
Q7. En déduire que est une matrice orthogonale symétrique.
IV - Le modèle d'Ising unidimensionnel
Pour tout , on note la matrice de définie par
On remarque que . On pose .
Q8. Vérifier que, dans le cas où est la matrice dont, pour tout , le coefficient d'indice ( ) vaut 1 si les sommets et du graphe ci-contre sont reliés par une arrête et vaut 0 sinon. Cela signifie que chaque particule n'est en interaction qu'avec ses deux voisins les plus proches.
Q9. Écrire, en langage Python, une fonction mat_adj (graphe) qui prend en argument un graphe de sommets, orienté ou non, représenté par un dictionnaire ayant pour clefs les entiers de 0 à , et pour valeur associée à une telle clef la liste d'adjacence du sommet correspondant, et qui renvoie, en respectant l'énumération des sommets, la matrice d'adjacence de ce graphe.
Ainsi mat_adj doit renvoyer
Q10. Montrer que, pour tout .
Q11. En déduire un polynôme annulateur de , puis son spectre.
Q12. En déduire que admet les valeurs propres suivantes, énumérées avec leur multiplicité :
V - Le modèle d'Ising bidimensionnel
Soit . Soient et . On définit le produit de Kronecker de par , et on note , la matrice de qui est définie par blocs de taille de telle manière que, pour tout , le bloc d'indice ( ) soit . Autrement dit,
Outre et , on se donne encore deux entiers naturels non nuls, et .
Q13. Montrer que est une application bilinéaire de dans .
Q14. Montrer que, pour toutes matrices et , .
Q15. Montrer que si et sont diagonalisables, alors est diagonalisable et
On pourra commencer par déterminer l'inverse du produit de Kronecker de deux matrices inversibles.
On pose et
Q16. Vérifier que, dans le cas où est la matrice telle que, pour tout , le coefficient d'indice ( ) vaut 1 si les sommets et du graphe ci-contre sont reliés par une arête (les arêtes comptent qu'elles soient en pointillés ou en plein), et vaut 0 sinon.
Q17. On revient au cas général. Montrer que les valeurs propres de sont les , pour .
Partie B - Étude de la convergence de la magnétisation
Cette partie reprend les notations de la précédente mais les résultats sont totalement indépendants.
On se donne .
I - Magnétisation spontanée
Q18. Justifier que la fonction est dérivable sur et que .
On admet que, lorsque est dérivable sur , alors , c'est-à-dire , sur .
Enfin on note (toujours sous réserve d'existence) la magnétisation spontanée : il s'agit du champ magnétique moyen lorsque l'on fait tendre le champ magnétique extérieur vers 0 . S'il reste strictement positif, les particules conservent une aimantation. Ce n'est pas le cas s'il est nul.
II - Le modèle d'Ising
Dans cette sous-partie, on suppose que , matrice introduite dans la sous-partie A-IV.
On adoptera la convention suivante : pour tout , on note et .
Q19. Vérifier que
Q20. Montrer que, pour tous entiers naturels et supérieurs ou égaux à 2 , pour toute matrice et pour tout , le coefficient d'indice ( ) de la matrice est
le produit valant 1 dans le cas où .
On pose .
Q21. Montrer que , où tr désigne la trace d'une matrice carrée.
Q22. Déterminer les valeurs propres de la matrice .
Q23. Montrer alors que
Q24. En déduire une expression de la fonction et conclure que .
On rappelle que lorsque est dérivable sur .
III - Le modèle de Curie-Weiss
Dans cette sous-partie, on suppose que , matrice introduite dans la sous-partie A-II.
Q25. Pour tout , on pose . Vérifier que
Q26. Montrer que converge. On admet que sa valeur est .
Q27. Montrer que
Q28. En déduire que
Q29. Montrer que, pour tout ,
On pose .
Q30. Montrer que
Q31. En distinguant les cas selon que ou , montrer que admet un minimum sur atteint en un unique point . Montrer de plus que
(a) si et , alors ;
(b) si , alors ;
(c) quel que soit ,
(i) ;
(ii) ;
(iii) lorsque .
On suppose désormais que .
Q32. Justifier que atteint son minimum sur en un unique point qui est .
Q33. On note . Montrer que
Q34. On pose et on note . Montrer que est prolongeable en une fonction continue sur tout entier en posant .
Q35. Justifier que est minorée par un réel strictement positif (que l'on ne cherchera pas à déterminer).
Q36. Montrer alors que
puis conclure que .
Q37. Montrer que réalise une bijection continue de dans . En déduire que la fonction est continue sur et dérivable sur .
Q38. En déduire que est dérivable sur et que pour tout .
Q39. Montrer alors que si , et si .
IV - Convergence en loi pour la loi de Curie-Weiss au point critique
Dans cette sous-partie, on suppose toujours que . De plus, on suppose que et .
On note et on considère la fonction
Q40. Justifier que, pour toute fonction continue et bornée sur , la quantité
est bien définie.
Une démonstration analogue à celle de la sous-partie précédente permet alors de montrer que, pour toute fonction continue et bornée sur ,
Q41. Soit , et soit une fonction -lipschitzienne et bornée sur . Montrer que
et en déduire que
On se donne et . Soit un entier naturel non nul tel que . On définit la fonction
Q42. Montrer que est -lipschitzienne sur .
Q43. En déduire qu'il existe tel que, pour tout ,
Q44. Montrer finalement que
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